Toujours pas de fumée blanche, au dernier jour du conclave des retraites information fournie par AFP 23/06/2025 à 19:01
Après un coup de com' du patronat devant les caméras à l'extérieur, les négociations ont repris entre les murs du conclave des retraites, alors que les partenaires sociaux sont censés boucler lundi, avec ou sans accord.
Preuve de discussions dans le dur, une suspension de séance a été décrétée en fin d'après-midi. "On est assez loin de la fumée blanche, s'il devait en avoir une. Chacun est dans son coin pour essayer de trouver des solutions", a résumé Pascale Coton, négociatrice de la CFTC. Syndicat qui pointe le patronat, qui aura "une très grande responsabilité ou toute la responsabilité si, aujourd'hui, on n'arrivait pas à un accord".
L'après-midi a commencé par un coup médiatique. Patrick Martin, président du Medef, et Amir Reza-Tofighi, président de la CPME (patronat des petites et moyennes entreprises), ont convoqué la presse une demi-heure avant la reprise du conclave à 15H00.
Sur le trottoir, devant le bâtiment abritant ces discussions, ils se sont dits confiants dans un accord possible grâce à une "proposition commune" sur "les différents éléments qui sont attendus par les syndicats de salariés", notamment l'âge de la décote, les carrières des femmes, la pénibilité.
Dans ses nouvelles propositions, le patronat a notamment semblé ouvrir une petite porte vers un départ anticipé à la retraite en cas d'usure mais seulement sur avis médical. Insuffisant pour les syndicats, qui veulent une automaticité sur la question et fustigent autant le fond que la forme.
"C'est la der des der", "on demande que la négociation se fasse sur le texte paritaire", déjà sur la table et non sur les nouvelles propositions du Medef, a insisté Yvan Ricordeau, négociateur pour la CFDT.
- "Guet-apens ?" -
Ce dernier a d'ailleurs interpellé, sur le pavé, le dirigeant du Medef, devant les caméras, après le mini point-presse patronal:
- "Monsieur Martin ? Est-ce que la négociation s'opère sur le texte qu'on a discuté depuis quatre mois ?"
- "On ne va pas tenir la négociation ici", répond le patron du Medef
- "Pourquoi la partie patronale l'a tentée sur le trottoir, alors ?" relance le syndicaliste
- "C'est quoi ce guet-apens qu'on essaie de me tendre là ?", sourit pour couper court le dirigeant du Medef, tandis que le représentant de la CFDT conclut: "Ça commence bien, ça commence dans la rue".
Comme Yvan Ricordeau, Christelle Thieffinne, négociatrice de la CFE-CGC, juge que "la partie patronale n'a pas joué le jeu", et elle mesure désormais les chances de réussite de la négociation proches de "zéro". "Ils torpillent cette négociation", a jaugé la syndicaliste.
Ce processus a déjà laissé des partenaires sociaux sur le bord de la route: FO a tourné les talons dès la première séance et la CGT et l'U2P (patronat pour les artisans) ont jeté l'éponge mi-mars.
La dernière réunion, le 17 juin, s'est achevée sur une prolongation arrachée sur le fil pour éviter l'échec. Une de plus dans une discussion entamée le 27 février et qui devait s'arrêter à l'origine le 28 mai.
- Départs anticipés ou non -
Le principal point d'achoppement tourne autour de la finalité d'une reconnaissance de l'usure professionnelle: les syndicats y voient une ouverture aux départs anticipés à la retraite, le patronat privilégie d'autres pistes, telle la reconversion.
Pour le reste, il est acquis que l'âge du départ à la retraite ne bougera pas: sans surprise le Medef s'est montré inflexible sur son maintien à 64 ans. Quoi qu'il arrive à l'issue de la réunion de la dernière chance, cette mesure phare, et impopulaire, de la réforme Borne de 2023 sera donc toujours en vigueur pour les salariés nés à partir du 1er janvier 1968.
Un compromis, plus consensuel, pourrait en revanche se dessiner autour de la carrière des femmes et de la revalorisation des pensions en fonction du nombre d'enfants qu'elles ont eus.
La fin du conclave est aussi un moment de vérité pour François Bayrou, qui a lancé ce nouveau format de discussions après un compromis noué avec les socialistes pour éviter une censure du gouvernement. Et le Premier ministre s'était engagé à en présenter les conclusions devant le Parlement.
"A partir du moment où ce conclave n'aboutit pas sur l'abrogation de la réforme des retraites, nous déposerons une motion de censure", a promis Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise. Mais LFI aurait besoin du soutien d'autres groupes à gauche. Et le Parti socialiste est divisé sur la question.